Maison à Châteauguay
Située sur la rue Salaberry Sud à Châteauguay, le projet consiste en la rénovation d’un bâtiment patrimonial construit en 1814 et la construction d’un agrandissement contemporain.
Originalement un atelier de tissage pour la communauté religieuse des Sœurs Grises, la partie existante est rénovée de l’intérieur pour révéler sa structure et ses matériaux d’origine.
Site et contexte
Située du côté de la rivière, la maison surplombe le parc Martineau depuis le flanc d’un léger talus. La forte présence de végétation, la tranquillité du secteur et la proximité à la rivière influencent le caractère du projet.
Relation à la maison patrimoniale
Depuis la rue, l’agrandissement s’exprime sobrement en rapport à la maison patrimoniale. La largeur réduite de l’ajout et la faible pente de son toit préserve la prédominance de la maison d’origine. Son implantation décalée vers le fond du lot permet de ne pas gêner l’ensoleillement de la partie existante.
Une délicate passerelle vitrée connecte les deux volumes tout en préservant la perception entière de la maison d’origine à partir de la rue. Sa transparence permet aussi de distinguer clairement les deux époques d’intervention. Le cèdre grisonnant et le béton rugueux qui recouvrent l’agrandissement rappellent les teintes grises et chaudes de la pierre existante. Le revêtement métallique de la passerelle s’agence à la toiture en tôle grise à la canadienne de l’ancienne maison. Comme la maison d’origine, les matériaux de l’annexe sont durables et leur patine évoluera avec le temps. Son langage contemporain valorise par contraste le caractère patrimonial de l’ancienne maison.
Rapport au paysage
La toiture végétalisée et l’aménagement extérieur dialoguent avec le paysage. De larges pierres sont déposées entre les deux parties de la maison, telle une rigole qui se déverse vers la rivière en contrebas.
Du côté de la rue, l’ajout est assis sur un socle en béton alors qu’à l’arrière, il est délicatement appuyé sur de fines colonnes afin de minimiser l’impact au sol et lui conférer un aspect aérien, en surplomb sur le paysage.
Le volume de l’annexe est habillé de planches verticales ajourées qui laissent passer l’air et l’eau. Ces lattes ajourées servent aussi d’écrans d’intimité pour la terrasse couverte à l’arrière et devant certaines fenêtres.
Le toit végétal ralentit l’écoulement de l’eau et contribue ainsi à la résilience du réseau aquifère environnant.
Orientations et ouvertures
La maison d’origine, avec ses murs épais, ses ouvertures profondes et limitées en dimensions, n’offre pas de large vue étendue sur le paysage. L’agrandissement, par ses ouvertures généreuses, crée une atmosphère distincte en plus de permettre une bonne ventilation naturelle.
Côté rue, la fenêtre de la salle de bain se camoufle derrière un écran de lattes ajourées. À l’opposé, la chambre flotte au-dessus de la cour. Par de larges portes vitrées, elle s’ouvre sur une terrasse offrant une vue sur le terrain boisé et la rivière.
«Dé-rénover»
À l’intérieur de la maison patrimoniale, nous cherchions à revenir aux conditions d’origine qui avaient été dissimulées par différentes interventions au fil du temps. Notre approche vise à dissocier les éléments existants rugueux et texturés des nouveaux, lisses et épurés. Les cloisons sont dégarnies pour dégager les murs extérieurs en pierre. L’escalier traditionnel se trouve au centre de l’espace, détaché des murs de périmètre et adossé à la cuisine. Seuls des objets ponctuels et mobiles sont en contact avec la pierre. Les clients qualifient cette partie du projet comme une «dé-rénovation»: mettre en valeur l’existant par soustraction plutôt que par l’addition de nouveaux éléments. Le sous-sol et l’étage sont retouchés selon le même esprit.
Parcours
On entre de plain-pied par l’entrée d’origine, côté rue. L’escalier et le comptoir de cuisine séparent l’aire ouverte du rez-de-chaussée en deux zones : d’un côté la cuisine et de l’autre, le séjour, où se fait le raccord avec l’agrandissement par la passerelle vitrée.
L’ambiance change totalement lorsque l’on met les pieds sur la passerelle. Pendant un instant, on est à l’extérieur, en suspension entre deux espaces. On perçoit à la fois les anciens murs de pierre de la maison d’origine et ceux en lattes de bois de la nouvelle partie. Le revêtement de plancher passe du bois au béton.
L’agrandissement abrite la chambre principale et sa suite. Sous le plafond en poutres lamellées-collées et pontage de bois, un volume en panneaux de béton sépare l’espace entre la chambre et la salle de bain. On perçoit ce volume comme un objet monolithique déposé au milieu du plan. L’angle de la passerelle dirige la circulation vers la chambre et confère une intimité naturelle à la salle de bain sans y ajouter de porte.
Année: 2023
Équipe : Paul Bernier, Luc-Olivier Daigle, Evelyne St-Jacques
Ingénieur(e)s en structure : Alain Mousseau (Calculatec)
Photos : Raphaël Thibodeau